jeudi 2 août 2012

2 août - Solennité de Notre-Dame des Anges

Homélie de la solennité de Notre-Dame, 
"Reine des Anges et des 9 chœurs des Esprits bienheureux",
en la chapelle des Saints-Anges de la Cathédrale Notre-Dame d’Évreux


Notre Dame des Anges
Chers frères et sœurs ;

Ce 2 août, le Seigneur nous fait encore la grâce de nous retrouver pour célébrer la solennité de Notre Dame – Reine des Anges et des neuf chœurs des Esprits bienheureux. Et pas n'importe où ! Dans la chapelle où repose M. Boudon, devant ce tableau de Notre Dame des Anges, qu'il fit peindre il y a bien longtemps, pour notre édification.

Ce titre de « Reine des Anges » est ancien et bien singulier.
Que la Vierge Marie soit le modèle des saints et notre protectrice, soit. Mais qu’elle soit reine des Anges, voilà un titre étonnant.
Comment une femme, toute immaculée qu’elle soit, peut-elle porter le titre de « Reine des Anges et des Esprits bienheureux » ?

En effet, les Anges sont des créatures pures, spirituelles. Les Psaumes et l’Epître aux Hébreux nous rappellent qu’ils sont de nature ignée – c’est-à-dire de feu – et spirituelle. Ce sont, comme dirait M. Boudon, des êtres créés de pur amour.
Les rabbins affirment qu’ils furent créés le 1er jour, quand Dieu sépara la lumière des ténèbres, à savoir quand les anges de lumière furent séparés des anges devenus ténébreux du fait de leur révolte contre Dieu.
Créés bien avant l’homme, le 1er jour de la semaine originelle, leur mission est de célébrer la louange divine. Ce sont les serviteurs et les messagers de sa Parole, le Verbe éternel, Notre Seigneur Jésus-Christ.

Le péché des Anges posa de nombreuses questions aux rabbins comme aux Pères de l’Eglise. Le livre de l’Apocalypse nous rapporte ce combat qui opposa Satan – Lucifer au sublime Séraphin saint Michel Archange. Mais l’Ecriture ne nous dit pas la cause, le pourquoi de cette révolte.

Les Esprits bienheureux,
Trône du Verbe éternel
Certains avancèrent que c’est le projet divin de la création de l’homme qui divisa les Anges.
Imaginez : voici que ces esprits de pur amour, les premiers créés, font face à un être créé le 6e jour, le même jour que les animaux. Car qu’est-ce que l’homme, si ce n’est l’union de la terre au souffle divin ?
L’homme, si animal à bien des égards par la matière qui le compose et ses instincts ; l’homme serait au-dessus des anges ! Voilà quelque chose que certains des esprits bienheureux ne pouvaient supporter. Eux, si purs, si nobles ; nous, si pauvres, si fragiles. Eux, les premiers créés ; nous, les derniers. Eux, d’une nature si simple ; nous, si compliquée, et ce avant même que le péché nous complexifie encore un peu plus !

Comme le chante le Psaume VIII : "Qu'est-ce que l'homme pour que tu penses à lui, le fils d'un homme, que tu en prennes souci ? Tu l'as voulu un peu moindre qu'un dieu – d’autres traduisent, « un peu moindre qu’un ange », le couronnant de gloire et d'honneur ; tu l'établis sur les œuvres de tes mains, tu mets toute chose à ses pieds : les troupeaux de bœufs et de brebis, et même les bêtes sauvages, les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, tout ce qui va son chemin dans les eaux. O Seigneur, notre Dieu, qu'il est grand ton nom par toute la terre !"

C’en était trop pour le porte-Lumière, Lucifer, le plus ardent et le premier parmi l’ordre des Séraphins, celui qui était le plus près de la Lumière née de la Lumière, le Verbe éternel, la 2e Personne de la TS. Trinité !
Devoir s’abaisser à obéir et protéger cet amas de boue, même animé par l’Esprit Saint, voilà quelque chose qui lui semblait aberrant et impossible. Cet ordre divin lui était insupportable.
Comme dit Isaïe le Prophète : Comment es-tu tombé du ciel, astre brillant, fils de l'aurore ? Comment es-tu renversé par terre, toi, le destructeur des nations ? Toi qui disais en ton cœur : "Je monterai dans les cieux ; au-dessus des étoiles de Dieu, j'élèverai mon trône ; je m'assiérai sur la montagne de l'assemblée, dans les profondeurs du septentrion ; je monterai sur les sommets des nues, je serai semblable au Très-Haut !..." Et te voilà descendu au schéol, dans les profondeurs de l'abîme !

Le péché originel,
Chapelle Sixtine
D’où le fameux "Non serviam", « Je ne servirai pas », attribué à Satan. 
Satan, si beau, si pur qu’il s’enorgueillissait d’être le premier dans l’ordre des Esprits bienheureux, devint ténébreux. Il s’obscurcit d’orgueil, de pensées criminelles à l’égard de celui qui était choisi à sa place, Adam, notre premier père. Il devint, comme l'appela Notre Seigneur "L'homicide dès l'origine" en voulant faire chuter Adam et Ève, puis le Christ au désert et nous, aujourd'hui.
Celui qui devint le prince des démons s’est exalté et refusa de servir Dieu et sa plus belle création, l’homme. L’orgueil de Satan fut de se croire meilleur, au-dessus de ce que Dieu a déclaré "très bon". 
La tentation de S. Augustin,
le démon lui présente les vices,
par Michael Pacher, 1483
Car c’est bien de cela qu’il s’agit : quand Dieu crée les Anges, les plantes, les astres, le ciel et la terre et tout ce qu’ils contiennent : Il vit que cela était bon. Mais quand Dieu nous crée : Il vit que cela était très bon.
L’homme serait donc meilleur que l’Ange – non pas par la pureté et la simplicité de sa nature mais par élection, par grâce et pure condescendance de l’amour divin – ; et l’Ange serait fait pour l’homme, au service de l’homme, comme le reste de la création.

D’ailleurs, voyez comme l’Archange Gabriel salue la Vierge Marie. Vous pourriez me rétorquer que Marie est toute pure et toute sainte, l’Immaculée, appelée à porter en sa chair le Fils éternel et bien-aimé de Dieu. Vous auriez raison.
Ce que fait l’Archange Gabriel dans le récit de l’Annonciation que nous venons d’entendre montre bien à quel point Marie est et mérite ce titre de « Reine des Anges ». Saint Gabriel s’agenouille devant elle, la salue, la prévient, l’enseigne avec beaucoup de délicatesses.
La Vierge Marie, en tant que Mère de Dieu, est Reine des Anges et des Esprits bienheureux. Mais ce que fait l’Archange pour elle, les saints Anges le font aussi pour nous.

Si elle seule mérite ce titre de Reine, les Anges nous servent aussi. En effet, par un décret divin, le Fils de Dieu à fait de nous ses frères.
Rappelez-vous, quand Jésus, Roi des Juifs et de l’Univers mourrait pour nous sur l’Autel de la Croix. Il dit à sa Mère : Voici ton fils. Et le disciple bien-aimé la prit chez lui. Et nous, Il nous appelle : mes amis. Il nous a donné la prière du Notre Père et par le saint Baptême nous sommes devenus enfants de Dieu. Son Père est le nôtre, par adoption. Sa TS. Mère est la nôtre, en vertu du don qu’Il a fait une fois pour toute du plus haut de la Croix au moment où Il passait de ce monde à son Père.
Alors nous aussi sommes des rois, frères du seul Roi de l’Univers par la puissance du saint Baptême et de la maternité divine de Notre Dame.

Francesco Botticini
Les S. Archanges Michel, Raphaël et Gabriel
guidant un jeune homme
Nous célébrons cette solennité, ce n’est pas seulement pour célébrer l’un des nombreux titres de Marie. C’est aussi pour découvrir qu’elle est notre vocation et ce que nous sommes. Marie est Reine des Anges, mais ces saints Anges nous servent et nous aiment comme ils aiment et servent fidèlement Notre Dame et notre Reine.

N’oublions pas que les Anges apparaissaient aux hommes déjà dans l’Ancien Testament et qu’ils les saluaient avec beaucoup de déférence. Ils se mirent même à leur service : 
-l’Archange Gabriel inspirant et guidant le prophète Daniel ; 
-l’Archange saint Raphaël se fit le guide et le protecteur de Tobie et Sarah contre le démon Asmodée ; 
-les sublimes Séraphins purifièrent les lèvres du prophète Isaïe pour qu’il soit efficace dans sa mission ; 
-saint Michel et les armées célestes combattirent aux côtés du peuple de Dieu contre les païens qui voulaient les exterminer ; 
-et combien d’Anges se firent les serviteurs, les gardiens, les protecteurs des hommes qui n’étaient pourtant pas des immaculées conceptions !

Monsieur Boudon, qui est un guide sûr et un véritable père pour nous, enseigne, à la suite des saints, dans la Dévotion aux neufs chœurs des Esprits bienheureux (Ier traité, 4e motif) :  
Tous les anges, enseigne saint Augustin, sont à notre garde, puisque et eux et nous, nous ne faisons qu'une même cité de Dieu, dont une partie que composent les hommes, qui est encore dans la voie, est assistée de l'autre partie, qui sont les anges, qui vivent dans la bienheureuse possession de la fin. Quand l'on parle des anges qui veillent au salut des hommes, dit l'éloquent saint Jean Chrysostome, il ne faut pas seulement entendre les anges des derniers chœurs, mais ceux même des plus élevés et des premiers.

Et combien de témoignages nous sont donnés dans la vie des saints, tant dans le Nouveau Testament avec les Apôtres, comme au fil de l’Histoire sainte !

Avons-nous jamais bien pensé, demande M. Boudon, à une grâce si rare et si étonnante ? Un prince du sang royal qui viendrait dans un méchant village, pour y passer quelque temps au service d'un pauvre paysan, dans un chétif taudis, ne ferait-il pas l'étonnement de tout l’univers ?
S. Gabriel, par Lorenzo Lotto
Et si ce paysan était son ennemi, qui le maltraitât sans cesse, et dont le prince ne pût rien attendre pour ses propres intérêts, sans doute c'est ce qui augmenterait beaucoup l'admiration de tout le monde ; mais enfin, si ce prince non-seulement passait quelques mois, quelques années auprès de ce misérable, mais s'il ne le quittait pas jusqu'au dernier soupir de sa vie, qu'il ne le perdit jamais de vue, qu'il fût toujours auprès de cet homme, non-seulement ingrat, non-seulement méchant, mais encore tout brutal, tout plein de maladies puantes, d'ulcères effroyables, de vermines, de gale, et de tout ce qu'il y a de plus infect, où en seraient les esprits des hommes ? (Ier traité, 5e motif).

Ce que décrit là notre vénérable père dans la foi est à la fois la si belle et la si triste vérité.
C’est une belle vérité que de savoir que nos saints Anges gardiens ne sont pas dégoûtés par nos péchés. La patience que Dieu a pour nous, ils l’ont eux aussi. 
S’ils servaient Marie, ils nous servent aussi avec la même joie, le même empressement, le même amour. Ils souffrent nos révoltes et sont toujours là pour nous conseiller et nous guider vers le confessionnal et les droits chemins qui nous guident vers le Royaume. Puisque nous sommes des fils de Dieu, vivons comme il se doit, selon notre rang !
Car c’est une triste réalité que nous leur faisons parfois vivre. Ils contemplent notre misère, cette misère qui vient de notre folie, de la folie même du diable.

Comme Marie est bonne de nous envoyer ses saints serviteurs de grâce et de feu, de pur amour ! En cette belle solennité, remercions la Vierge Mère de Dieu, notre Mère.
Oui, sainte Mère, nous vous remercions de nous envoyer vos saints serviteurs qui nous gardent et nous guident. 
Reine des Anges, priez pour nous et daignez envoyer vos légions célestes car notre monde a tant besoin de votre aide pour écouter et aimer Dieu, pour apprendre à repousser les assauts de la Bête immonde et des ses acolytes. 
Que les saints Anges nous apprennent à aimer, à servir et à louer pour qu'un jour, ensemble et d'une même voix, nous chantions devant le Trône de Dieu un Sanctus éternel. Amen.



abbé Nicolas Van der Maelen
Prêtre du Diocèse de Paris
Saint-François de Molitor

Détail de la Dispute du Saint-Sacrement, Palais Apostolique.
Le Seigneur ressuscité trône au milieu des S. Anges, de Marie - Reine des Anges et de S. Jean Baptiste



A l'issue de la sainte Messe, l'abbé Nicolas Van der Maelen a rappelé qu'en ce 2 août, l'Eglise concède aux conditions habituelles, la grâce de l'indulgence plénière dite de "la Portioncule". (1)

Tout fidèle, 
          - ayant récité le "Credo" ; le "Notre Père" ; et le "Je vous salue Marie" aux intentions du Souverain Pontife, Notre Saint Père le Pape Benoît XVI ; 
         - étant en état de grâce (c'est-à-dire, s'étant confessé et promettant à Dieu de désormais vivre dans sa grâce en refusant le péché, même véniel) ; 
         - ayant assisté à la Messe et ayant communié 
         - et ayant visité une église ou chapelle pour y prier ;
peut recevoir la grâce de la rémission de la peine temporelle de ses péchés, pour lui-même ou pour les défunts




(1) cf. l'homélie de la solennité de Notre-Dame des Anges de l'an dernier, publiée pour la fête de la S. François d'Assise (article du 27 septembre 2011) à l'origine de cette grande grâce.



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